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Véhicule électrique et dîner de Noël : kit de survie !

Si vous passez les fêtes de fin d’année en famille, il y a des risques qu’un oncle légèrement climatosceptique se lance dans une tirade aussi longue que gênante sur le véhicule électrique.

Mais oui, il en est certain, il a vu passer sur Facebook une vidéo qui dit que le véhicule électrique est bien pire que son équivalent thermique. Il paraît que c’est encore un coup d’un lobby quelconque qui cherche à nous influencer.

Petit kit de survie dans cet article pour remettre gentiment tonton à sa place en lui apportant des réponses factuelles et sourcées.  

 

« J’en suis certain, le véhicule électrique émet plus de CO2 que le véhicule thermique. »

C’est faux.

Certes, le véhicule électrique émet davantage de gaz à effet de serre lors de sa fabrication. En revanche, lorsqu’on l’utilise, le véhicule électrique émet beaucoup, beaucoup moins de CO2.

Il faut donc considérer le cycle de vie complet d’un véhicule (de l'extraction des matières premières à sa fin de vie) pour trancher cette question. Les études scientifiques sont désormais unanimes. Pour en avoir le cœur net, Aurélien Bigo, chercheur sur le sujet a compilé 10 études de références sur différents modèles de véhicules :

Toutes ces études montrent qu’un véhicule électrique émet entre 2 et 5 fois moins que son équivalent thermique. C’est considérable !

En résumé, le surplus de CO2 émis lors de la fabrication du véhicule électrique est très largement compensé par la réduction des émissions à l’usage.

Bilan d'émissions des voitures

« C’est vrai en France avec le nucléaire, mais ça ne tient pas la route dans des pays à l’électricité carbonée »

Effectivement, nous avons la chance en France de bénéficier d’une électricité largement décarbonée, grâce au nucléaire et aux énergies renouvelables (hydroélectricité notamment). Cet avantage compétitif accroît le bénéfice climatique du véhicule électrique.

Cela dit, le véhicule électrique reste moins émetteur que son équivalent thermique dans quasi tous les pays. Le cabinet Carbone 4 a fait les calculs et le véhicule électrique gagne le match en Allemagne, en Chine, et même en Pologne. Ce sont pourtant trois pays dans lesquels l’électricité est encore produite massivement à partir de charbon.

Empreinte carbone moyenne par pays pour les voitures électriques

« Bon admettons pour le CO2… Le vrai problème du véhicule électrique, c’est qu’il faut des quantités énormes de terres rares pour fabriquer les batteries ! »

Décidément, il faut arrêter de consulter les sites relayant des fakes news. Ce chiffon rouge des terres rares1 est un sujet largement « débunké » par les experts sérieux du secteur.

1/ Les batteries produites aujourd’hui, dans leur écrasante majorité, ne contiennent aucune terre rare dans leurs matériaux de fabrication.

2/ Le sujet est moins sur les terres rares que sur certains métaux qui sont très utiles à la transition énergétique (panneaux solaires, éoliennes… et effectivement batteries). Pour les véhicules électriques, on parle notamment du lithium, du cobalt, du cuivre ou encore du nickel. Pour faire face à cette demande exponentielle à horizon 2030, des plans sont déjà à l’œuvre pour y faire face sereinement :

  • Diversifier les approvisionnements. Une mine de lithium va, par exemple, ouvrir en France dans l’Allier en 2028. Elle réserve des quantités gigantesques et devrait pouvoir fournir les besoins en lithium pour équiper l’équivalent de 700 000 véhicules par an pour une durée de 25 ans. On le sait peu, mais ces métaux utiles à la transition sont mieux répartis dans le monde que le pétrole.
  • Mieux recycler ces métaux. On va en reparler un peu plus en détail ci-dessous…
  • Favoriser le déploiement des nouvelles technologies de batteries bien moins gourmandes en métaux. On pense ici notamment aux batteries solides.

C’est d’ailleurs une très belle opportunité industrielle pour la France. Pour s’en convaincre, il suffit de consulter la note du Commissariat Général au Développement Durable intitulée : La mobilité bas-carbone : choix technologiques, enjeux matières et opportunités industrielles2.

 

« La batterie ne se recycle pas, c’est une catastrophe écologique »

Pour qu’il existe une filière de recyclage efficace, encore faut-il avoir suffisamment de batteries à recycler. En 2018, les véhicules électriques ne représentaient que 1% des ventes de véhicules neufs. Il est donc assez logique de ne pas disposer encore de toutes les filières pour recycler des batteries encore largement utilisées.

Si les batteries ne sont pas encore toutes recyclées, elles sont pourtant très largement recyclables. Une batterie Li-ion est actuellement recyclable à hauteur de 50%3 par pyrométallurgie. Son taux de recyclage pourrait atteindre jusqu’à 80-90% avec de nouveaux procédés.

Le Parlement Européen4 participe au développement de la filière en imposant des obligations et des objectifs ambitieux en matière de collecte, de recyclage et de taux de matériaux recyclés pour produire de nouvelles batteries. 

Par ailleurs, avant d’arriver dans une filière de recyclage, une batterie de voiture peut être utilisée pour d’autres usages. D’anciennes batteries de véhicules électriques peuvent notamment être utilisées pour stocker de l’électricité dans des bâtiments. Une seconde vie pour maximiser l’usage de la batterie avant sa fin de vie.

 

« Même si écologiquement, c’est moins pire que ce que je pensais, on n’aura jamais assez d’électricité si tout le monde passe à l’électrique. »

Et quid du pétrole ? En restant tous en véhicules thermiques, sommes-nous bien sûr d’en avoir suffisamment, et à prix abordable à horizon 2050 ?

Pour ce qui est de l’électricité, c’est une bonne question que s’est déjà posée RTE, le gestionnaire de notre réseau électrique. RTE réalise des modélisations à horizon 2035 et 2050 de la demande en électricité pour dimensionner en conséquence la production.

RTE démontre qu’en 2035, quelques soient les scénarios retenus, la mobilité ne devrait représenter qu’environ 10%5 de la consommation d’électricité. Ce n’est pas négligeable, mais ce n’est pas non plus complètement démesuré.

Au-delà de la quantité globale d’électricité à produire, il faut aussi regarder les pics de production. Là encore, la mobilité ne devrait pas poser de problèmes majeurs car les véhicules se rechargent plutôt la nuit lors des creux de consommation.

Encore mieux, avec des technologies comme le vehicule-to-grid6, les batteries des voitures peuvent venir aider le réseau électrique en restituant quelques kWh lorsque le réseau en a besoin !

 

« Et les files d’attente interminables aux bornes de recharge quand tout le monde voudra recharger, vous y avez pensé ? »

Encore raté ! C’est une erreur de penser qu’un véhicule électrique se recharge comme on faisait le plein d’un véhicule thermique.

Dans les faits, selon le dernier chiffre de l’AVERE, 90% de la recharge se fait au bureau ou au domicile. La recharge en itinérance est marginale.

Quand bien même, le nombre de bornes publiques de recharge explose. Nous en comptons près de 110 000 sur le territoire et Clément Beaune, le ministre des Transports a annoncé le 27 octobre une enveloppe de 200 millions d’euros pour atteindre 400 000 bornes d’ici 2030.

Par ailleurs, ce sujet de la recharge va devenir encore anecdotique au fur et à mesure des progrès réalisés en matière d’autonomie. Par exemple, le dernier 3008 de Peugeot commercialisé en 2024 aura une autonomie pouvant aller jusqu’à 700 km !

 

 


1https://fr.wikipedia.org/wiki/Terre_rare

2https://www.notre-environnement.gouv.fr/donnees-et-ressources/ressources/publications/article/la-mobilite-bas-carbone-choix-technologiques-enjeux-matieres-et-opportunites

3https://www.carbone4.com/analyse-faq-voiture-electrique

4https://www.europarl.europa.eu/news/fr/headlines/economy/20220228STO24218/de-nouvelles-regles-europeennes-pour-des-batteries-plus-durables-et-ethiques

5https://www.rte-france.com/actualites/bilan-previsionnel-transformation-systeme-electrique-2023-2035

6https://www.renaultgroup.com/news-onair/actualites/quel-est-le-principe-du-v2g-ou-vehicle-to-grid/